Journée d’études – « Formes et fonctions du dessin technique (XVIe-XXe siècle) »

Date et horaire

16 décembre 2020

À partir de 9h30

Lieu

Société des Arts de Genève

ou

En ligne (sur inscription)

Léonard Racle, Mémoire et réflexions sur les différents systèmes de ponts…

Programme de recherche soutenu par le Labex HASTEC, le Centre Alexandre Koyré (CAK) et le Centre d’histoire moderne et contemporaine (IHMC).

Journée organisée par Liliane Hilaire-Pérez, Valérie Nègre, Sylvain Wenger et la Société des Arts de Genève.

Programme

9h00 – Accueil

9h30 – Introduction : Liliane Hilaire-Pérez (Université de Paris), Etienne Lachat (Société des Arts de Genève), Valérie Nègre (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), Sylvain Wenger (Société des Arts de Genève)

10h – Frédéric Métin, Université de Bourgogne/ INSPE
Faire sur le papier, ce que vous voyez dans le Livre. L’usage du dessin dans l’enseignement de la fortification au 17e siècle

Au 17e siècle, les ouvrages de fortification présentent une différence majeure avec ceux de géométrie pratique qui les accompagnent souvent: les images qu’ils contiennent sont destinées à donner à voir des formes géométriques dont l’adéquation à un cahier des charges doit être mis en évidence. Ces dessins sont indissociables de la manière (de fortifier) de leurs auteurs, c’est-à-dire de l’algorithme de tracé.
Contrairement à la géométrie ordinaire, dans laquelle les figures sont destinées à soutenir la pensée dans l’exploration des propriétés des figures, le dessin de fortification est une invention de forme, comme on le voit à l’origine dans les carnets de Léonard de Vinci. Jusqu’à la fin du 16e siècle, imprimés et manuscrits italiens présentent des profils de forteresses sans porter d’attention particulière sur
Au tournant du 17e siècle, Jean Errard, ingénieur du roi Henri IV, publie La fortification réduite en art et démontrée, dans laquelle les profils sont créés en tenant compte des contraintes du terrain (portée des armes, résistance des remparts). L’adéquation des formes à la résistance des places lors des sièges est alors justifiée par le calcul des longueurs et des angles de la forteresse, à l’aide d’une géométrie classique parfaitement maîtrisée.
La fortification va devenir un objet d’enseignement, particulièrement chez les Jésuites dont les collèges accueillent l’élite de la noblesse française, les futurs officiers des armées du roi. Le dessin est préconisé comme pratique de la fortification sur le papier, même pour ceux qui n’iront pas sur les champs de bataille. Le geste est alors la meilleure façon d’apprivoiser les formes puis de s’approprier les manières de fortifier. La démonstration comme moyen de persuasion de l’excellence des profils disparaîtra au cours du 17e siècle et seul restera cette pratique du tracé, puisque toutes les formes viendront à se confondre avec ce que l’on appelle aujourd’hui les « étoiles de Vauban ».

10h30 – Patricia Subirade, Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne, IHMC
Culture visuelle, transmission et formalisation des savoirs: les dessins techniques de François Cuenot, architecte-ingénieur du XVIIe siècle

François Cuenot, sculpteur et architecte-ingénieur du duc de Savoie au XVIIe siècle a laissé un corpus très diversifié de dessins techniques, qui se définissent dans la culture occidentale comme des dessins « tracés par des techniciens à but professionnel » (Wolfgang Lefèvre, 2004). Ses dessins accompagnés ou non de textes, s’inscrivent dans des contextes de travail variés et reflètent la polyvalence des ingénieurs de l’époque moderne, avant la spécialisation des savoirs techniques au XVIIIe siècle : un carnet de dessins de sculpture, un traité d’architecture, un livre manuscrit sur les salines allemandes, des dessins de ponts. Leur fonction première est d’abord didactique, qu’il s’agisse du carnet d’atelier de sculpteur ou du traité d’architecture, destiné aux tailleurs de pierre, sculpteurs, peintres et architectes, qui relève d’un genre éditorial à grand succès commercial au XVIIe siècle. Le traité, inspiré de la Règle de Vignole, en reprend la forme des planches comportant le dessin et les nombres indiquant les proportions des modules, ce qui cible à la fois des praticiens ignorant l’arithmétique et ceux connaissant la science des nombres. En second lieu, les dessins du traité architectural et du manuscrit sur les salines formalisent aussi des savoirs. En outre, les dessins de ces deux ouvrages sont insérés dans des productions qui relèvent d’une relation de patronage avec le duc de Savoie. Enfin les dessins techniques de ponts s’intègrent dans la production de savoirs d’Etat et le développement des archives qui y est associé et à une autre échelle sont indispensables dans l’échange entre l’ingénieur ducal et les maçons et menuisiers qui interviennent sur les chantiers.

11h – Marie Thébaud-Sorger, CNRS, Centre Alexandre Koyré)
Collecter, traduire, transcrire et publier, l’usage du dessin technique chez Jean-Claude Pingeron

L’usage du dessin technique dans les lettres et publications du polygrapheJean-Claude Pingeron (entre 1776 et 1795) permettra de mettre en lumières différentes formes et fonctions du dessin technique à travers l’étude d’une trajectoire individuelle : à quel moment dessiner un procédé technique ? Pour quel interlocuteur ? Avec quelle intention ? Bien que qu’il ait une probable formation d’ingénieur militaire Pingeron est avant tout un amateur, érudit et collectionneur de techniques. Depuis ses croquis esquissés en marge des lettres de sa correspondance privée (parfois ses propres inventions), ses dessins réalisés sur site lors de voyages (avec l’intention d’être publiés), jusqu’aux dessins et planches gravées insérées effectivement dans quelques brochures, l’étude de ce corpus permet de soulever un certain nombre de questions interrogeant non seulement 1) en premier lieu le processus intellectuel de la traduction scripturaire et dessinées des techniques – traduction qui opère ici à de multiples niveaux : rendre intelligible les mouvements et processus dynamiques, et rendre accessible des savoirs anciens ou non autochtones pour les contemporains- mais aussi 2) en second lieu d’éclairer sur les conditions pratiques et les difficultés de leur diffusion imprimée ( recherche de bon dessinateur, d’imprimeurs, négociations sur les couts etc…)

11h30 – Patrice Bret (Centre Alexandre Koyré, EHESS-CNRS-MNHN), Claudine Fontanon (Centre Alexandre Koyré, EHESS-CNRS-MNHN)
Conception, réalisation et généalogie graphique : les planches de la Description de l’art de fabriquer les canons de Gaspard Monge, de l’Encyclopédie à l’Usulü’s-siyaga d’Ishak Efendi

En 1794, dans le cadre de la levée en masse de la nation en guerre contre l’Europe, le Comité de salut public chargea Gaspard Monge de rédiger la Description de l’art de fabriquer les canons afin de diffuser plus largement le contenu de son enseignement aux premiers « cours révolutionnaires » accélérés destinés à développer la production de salpêtre, de poudre et de canons. L’ouvrage comportait soixante planches réalisées par le bureau des dessinateurs du Comité dont les originaux sont conservés au Conservatoire national des arts et métiers, avec un certain nombre de versions projetées.
La communication se propose en particulier de préciser le contexte de cette réalisation, d’évaluer le rôle personnel de Monge, l’éventuel apport de la géométrie descriptive et d’identifier les acteurs, notamment les dessinateurs et graveurs. En distinguant les planches originales, souvent dessinées in situ, et les duplications et adaptations de planches tirées d’autres ouvrages comme l’Encyclopédie, la Description des arts et métiers ou l’Encyclopédie méthodique, nous questionnerons les choix opérés pour leur mise à jour et les solutions graphiques envisagées et retenues. Enfin, ces questions seront également posées avec le remploi de ces planches dans des ouvrages ultérieurs, tout particulièrement dans un cadre culturel différent, avec la traduction de l’ouvrage de Monge en turc ottoman, à l’usage de la fonderie impériale d’Istanbul, par le Başhoca Ishak Efendi (Usulü’s-siyaga) quarante ans plus tard.

12h00 – Discussion

— Pause déjeuner —

14h30 – Sylvain Wenger (Société des Arts de Genève)
Présentation des fonds de la Société des Arts et poursuite de la discussion

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Inscription : pour ceux qui souhaiteraient suivre la journée à distance, merci d’envoyer un message à valerie-negre@wanadoo.fr.